Ajoie, nahe Chevenez. Foto/Photo: TES.

La vie d’une vache en Suisse

Au Pays-Bas, la question de l’élevage qui suscite consternation et polarisation a quasi atteint son point culminant. A cet effet, voir ce qui se passe de l’autre côté de la frontière, notamment en Suisse, est toujours utile.

L’initiative populaire

Grâce au grand engagement des citoyens suisses, le pays est à l’avant-garde en ce qui concerne les exigences en matière de bien-être des animaux au sein des élevages, notamment l’accès à l’air libre, le nombre, l’alimentation, les stalles, le transport et l’abattage.

Le nombre maximum d’animaux autorisé est déjà fixé par la loi. Ainsi, les exploitations peuvent détenir jusqu’à 300 bovins, 1’ 500 porcs, 18’000 poulets et 27’000 poulets de chair, jusqu’à 28 jours d’engraissement.

Le 25 septembre 2022, dans le cadre de votations fédérales, les citoyens s’exprimeront sur une initiative populaire qui veut interdire l’élevage intensif en Suisse, quand bien même la législation sur l’élevage en Suisse est considérée comme la plus sévère au monde.

Le Conseil fédéral et le Parlement qui regroupe le Conseil national et le Conseil des Etats ont édicté leur recommandation à ce sujet et proposent de rejeter l’initiative considérant que les animaux de rente sont déjà très bien protégés. La décision finale appartiendra au peuple. Le Conseil fédéral a proposé un contre-projet à cette initiative qui, cependant, n’a pas trouvé de soutien au Parlement. Il ne sera donc pas soumis au vote.

Kanton Neuchâtel, La Sagne. Foto: TES.

La vie de la vache suisse

La vie de la vache suisse même sans initiative mais avec des subventions des cantons et de la Confédération est, en général, digne. Du fait de la structure de ses exploitations agricoles et de sa législation, la Suisse dispose de troupeaux de très petite taille, ce contribue à la santé de l’être humain et de l’animal, à la conservation de la nature, à la protection de l’environnement, à la réduction du taux d’implication de l’agriculteur et à son indépendance vis-à-vis des banques.

Cela ne signifie pas pour autant que la situation est idéale. En Suisse aussi, l’élevage industriel se développe et engendre un conflit d’intérêts entre la nature et l’économie, l’agriculteur et le citadin, sans compter les nuisances, les dangers sanitaires et la pollution de l’environnement. L’utilisation d’antibiotiques dans les élevages et de pesticides dans l’agriculture font également l’objet de discussions et d’initiatives populaires.

La politique

Comment faire face à ces problèmes en apportant une réponse politique, telle est la question. Le dialogue permanent entre les agriculteurs, les citoyens et le gouvernement (communal, cantonal et fédéral), le respect, l’engagement et l’intérêt des citadins pour l’agriculture et la nature en général caractérisent l’approche suisse.

Le citadin se rend également compte que les agriculteurs nourrissent la population depuis des siècles, qu’ils ont toujours fourni un dur labeur dans des conditions souvent difficiles sans rouler sur l’or. En été, par exemple, le bétail des régions de montagne accompagne le fermier ou la fermière dans les pâturages alpins où l’herbe est tendre, parfois jusqu’à la limite des arbres ou même au-delà, que le temps soit clément ou pas, ce qui n’est pas toujours idyllique à 2’000 mètres d’altitude en été.

L’agriculteur loge dans un chalet, petite construction en bois, devenu un terme générique pour les maisons en bois édifiées dans le pays au XIXème siècle, grâce aux touristes.  Lors de leur retour en plaine nommé la désalpe, tradition ancestrale qui s’est transformée ces dernières années en une grande fête populaire qui attire une foule dense, le fermier et ses vaches sont accueillis en héros.

L’arrivée des agriculteurs et ses vaches, Bâle, le 15 juillet 2022

 ‘le ranz des vaches‘ pour les agriculteurs et ses vaches.

Et le départ, le 15 juillet 2022. 

Conclusion

Il est vrai que, finalement, le même sort attend la vache en Suisse et celle des Pays-Bas, à savoir l’abattoir puisqu’elles sont destinées à la consommation. Cependant, la vache suisse vit plus longtemps et dans de meilleures conditions que ses congénères dans d’autres pays : telle est la volonté des citoyens – souverains – et du gouvernement.

L’agriculture fait aujourd’hui partie des débats politiques au même titre que l’énergie, les soins de santé, les transports publics ou l’éducation. Ainsi, la vache – ou la poule – participe de façon significative au fonctionnement d’un pays tant sur les plans constitutionnel que politique.

Rédaction et révision: Marianne Wyss, écrivain public et traductrice.

Impression d’une désalpe